L’Auroville Earth Institute et la promotion de l’architecture en terre

Publié le par Céline

Voici venu le temps de vous expliquer en quoi consiste mon travail ici en Inde. Et oui… parce que contrairement à ce que vous pouvez croire d’après les photos, je ne suis pas continuellement en vacances ! Bien au contraire !

 

Je suis donc ingénieur à l’Auroville Earth Institute, qui est un centre de recherche sur l’architecture en terre, et représentant de la chaire Unesco « Architecture en terre et Habitat durable » en Asie… et oui, rien que ça ! Lorsque l’on parle d’architecture en terre, n’imaginez pas des igloos tout boueux, on parle de vrais bâtiments, de petites maisons d’habitation aux grands bâtiments publics. Allez jeter un coup d’œil sur site de l’institut www.earth-auroville.com, très complet (un peu trop peut-être) avec des milliers de photos sur tous les projets. Les plus impressionnants sont certainement la communauté de Vikas  (13 appartements sur 4 étages) à Auroville ou encore la mosquée d’Al Medy en Arabie Saoudite. L’institut développe des projets dans le monde entier ; en ce moment une école en Tanzanie, et très bientôt une autre école au Népal.

 

Le Centre d'Accueil des Visiteurs (Visitor Center), Auroville

 

Logements d'accueil pour les stagiaires à l'Auroville Earth Institute (où nous vivons actuellement)


Les bureaux de l'Auroville Earth Institute

 

La mosquée d'Al Medy, Arabie Saoudite

 

Contrairement aux idées reçues, la terre n’est pas un sous-matériau pour construire et résiste très bien aux intempéries si entretenue normalement, même aux terribles moussons indiennes ! Pour ça, différentes techniques peuvent être utilisées, entre autres le pisé (Rammed Earth en anglais) qui permet de réaliser des murs relativement droits en tassant un mix de terre, sable et ciment dans un cadre adapté au mur voulu, ou encore les blocs de terre compressés et stabilisés (CSEB en anglais) qui s’utilisent eux comme des briques et permettent de réaliser n’importe quel design.

 

La conception de bâtiments en CSEB est légèrement différente des techniques de constructions habituelles, car les murs étant légèrement plus épais, le bâtiment n’a pas besoin de structure renforcée (c'est-à-dire que tous les murs sont porteurs). De plus, la construction d’arches, de voutes et de dômes est relativement facile, le bâtiment peut donc être plus original qu’en techniques conventionnelles. Et bien entendu, la couleur naturelle de la terre donne un lieu de vie très accueillant ! Au niveau coût, construire en CSEB n’est pas forcément plus cher qu’en briques normales, et écologiquement les émissions de CO2 liées au  bloc (production, transport des matières premières, etc.) sont bien moins importantes, car les CSEB sont produites et compressées manuellement et les matières premières sont bien souvent très locales. Certains critiquent le fait que creuser la terre détruit la faune et la flore locale, c’est tout à fait vrai, sauf si c’est fait de manière intelligente. La terre qui est utilisée ici pour les blocs provient de rejets de construction de grands bâtiments (excavation pour fondations par exemple), de la création d’étangs, de systèmes de récupération des eaux, etc. C’est donc de la terre qui serait creusée de toute manière !

 

Pour ceux qui serait intéressés par ces techniques, allez donc voir le site de l’institut, mais aussi le site de Craterre (unité de l’école d’architecture de Grenoble pour l’architecture en terre) http://terre.grenoble.archi.fr.

 

En ce qui concerne mon travail au sein de l’institut, j’occupe un poste qui est beaucoup plus management que technique. Je travaille donc sur pleins de choses différentes :

 

- Tout d’abord sur la création d’une entreprise (E’Block India) qui deviendrait indépendante de l’institut pour la vente de CSEB (voir le site http://sites.google.com/site/eblockindia). On a actuellement 2 unités de production qu’il faut gérer, et il y a du boulot… rien n’était vraiment au point que ce soit au niveau comptabilité, management de la production, des stocks, des commandes, marketing, etc. Je conçois donc des outils Excel formidables pour améliorer tout ça et puis je travaille avec une équipe de superviseurs sur site, d’architectes, de pro du marketing, etc.

 

 

Production manuelle de blocs

 

- Le second projet est la création d’une plateforme de professionnels de la construction en terre. Le but de celle-ci est de rapprocher tous les acteurs de ce domaine : les utilisateurs peuvent ainsi localiser les professionnels et leurs activités partout dans le monde par une carte Google Map, les contacter et proposer des coopérations ; pour les professionnels c’est une opportunité de présenter leurs projets et de se faire connaître du public. Le site est en cours de conception et sera lancé en janvier (si tout va bien !)

 

 

- Le troisième projet est un projet de recherche sur les différentes techniques de construction pour les murs, les fondations, les sols et les toits. On veut pouvoir obtenir des valeurs précises sur le coût, la quantité de CO2 rejetée, les caractéristiques mécaniques, etc. des différentes techniques, pour les comparer entre elles, et montrer que l’architecture en terre est compétitive à tous les niveaux et même bien mieux ! On a donc effectué une étude théorique, et on cherche maintenant à confirmer ces valeurs en se rendant sur les sites de construction et de production. A la fin, on espère avoir une série de cartes (une par techniques) reprenant toutes ces valeurs, et s’en servir comme outil marketing.

- Je vais bientôt commencer à travailler aussi sur une étude Eléments Finis des dômes en CSEB (pour les non-ingénieurs, les Eléments Finis est une technique de modélisation par ordinateur d’un objet ou d’une structure et qui permet de faire tout type de calcul en divisant cet objet en petits éléments). Le but est de pouvoir optimiser automatiquement l’épaisseur du dôme (que l’on cherche à réduire) tout en garantissant la stabilité.

- Et puis enfin, je passe pas mal de temps aussi à faire du management du bureau (ressources humaines, gestion du temps). Mon chef ne sera pas là pendant 2 mois, donc j’ai maintenant pas mal de choses à gérer à sa place !

 

   

J’espère que cet article n’a pas été trop ennuyeux (je sais bien que ce n’est pas comme décrire des voyages.. !), et qu’il répond à la question que tout le monde se posait… « Mais au fait, tu fais quoi exactement là-bas, t’es toujours en vacances ? » Et bien non !
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